Les characées

Herbier de characées par M. Kopf, licence CC BY-SA

Leur place dans l’histoire évolutive des végétaux

Bien que considérées comme des algues, les characées (division des Charophytes) sont plus proches d’un point de vue phylogénétique des plantes terrestres (division des Embryophytes : bryophytes et plantes vasculaires) que des principaux groupes d’algues vertes (tels que les Ulvophyceae et les Prasinophyceae appartenant à la division des Chlorophytes).
De ce fait, les Charophytes sont généralement considérées comme le groupe frère des Embryophytes.

La famille des characées est la seule représentante actuelle de l’ordre des Charales et de la classe des Charophyceae, au sein des Charophytes.

Organisation générale et biologie

Les characées partagent une architecture commune. L’appareil végétatif s’organise autour d’un axe principal sur lequel se succède une série nœuds d’où émergent des rameaux généralement verticillés et d’entre nœud long permettant l’allongement de la fronde. L’axe principale se ramifie en axes secondaires au niveau des nœuds plus ou moins nombreux.

Le port général et la taille sont très variables, certaines telles que Tolypella glomerata ne mesurent parfois que quelques centimètres alors que d’autres comme Chara intermedia peuvent dépasser un mètre.

Des confusions sont possibles avec certaines plantes vasculaires aquatiques telles que les Ceratophyllum ou les Myriophyllum dont les feuilles sont également verticillées. Néanmoins les feuilles de Myriophylles se distinguent par leurs nombreux segments linéaires opposées et celles des cératophylles sont caractéristiques par leur division « en fourche » ainsi que leur rigidité marquée.

Myriophyllum spicatum

Diversité taxonomique

Il existe plus de 400 espèces dans le monde.

La France compte 37 espèces de characées dont 2 espèces exogènes (Corillion 1975, Bailly et Schaefer 2010, Mouronval et al. 2016). Dans le département de l’Isère, 20 espèces sont citées (Labroche, 2017) à ce jour et faisant l’objet d’observation récente postérieure à 2010 (soit environ 50 % de la richesse spécifique de France métropolitaine).

6 genres sont présents en France dont 4 connus en Isère. La présence de filaments corticants et de stipulodes permet la différenciation des genres présents en France :

  • Chara : 18 espèces dont 11 connues en Isère
  • Nitella : 10 espèces dont 7 connues en Isère
  • Nitellopsis : 1 espèce en France et en Isère
  • Tolypella : 6 espèces dont 1 connue en Isère
  • Lamprothamnium : 1 espèce – non présente en Isère
  • Lychnothamnus : 1espèce – éteint en France et en Isère
Chara vulgaris
Nitella capillaris
Nitella tenuissima

Écologie

Les characées se développent dans des eaux stagnantes à faiblement courantes. Elles peuvent coloniser des milieux très variés : zones temporairement inondées (ornières, gouilles tourbeuses, mares…), fossés, abreuvoirs, fontaines ou encore de grands plans d’eau relativement profonds. Elles sont présentes en plaine comme en altitude. Les herbiers à characées sont des végétations pionnières. Généralement peu compétitifs, ils sont progressivement supplantés par les herbiers à macrophytes vasculaires. Cependant certaines végétations à characées peuvent perdurer durablement lorsque les conditions le permettent, en particulier dans les grands plans d’eau clairs et profonds.

Patrimonialité

Des espèces encore méconnues

La connaissance reste encore très lacunaire concernant les aires de répartition et les menaces sur ces espèces. Ainsi, les statuts de conservation (listes rouges nationales et régionales) ne sont pas encore établies. Il existe cependant une liste rouge pour la Suisse (Auderset et Schwarzer, 2012). D’un point de vue réglementaire, une seule espèce bénéficie d’un statut de protection national (Tolypella salina, endémique et très rare dans une lagune de Camargue).
La grande majorité de ces taxons est peu commune et mérite une attention particulière concernant leur conservation.

Intérêt en tant que habitats patrimoniaux

Les grands herbiers contribuent à améliorer la qualité physico-chimique de l’eau par le piégeage des particules organiques et minérales (augmentation de la transparence, limitation de l’eutrophisation). Ces herbiers procurent des habitats favorables à la faune aquatique : abris et zone de nourrissage pour les alevins, les larves d’amphibiens et de nombreux invertébrés aquatiques… Enfin, ce sont aussi des ressources alimentaires non négligeables pour de nombreux oiseaux d’eau.

Ainsi, les herbiers à Characées sont désignés habitats d’intérêt communautaire par la Directive européenne Habitat-Faune-Flore de 1992. Ces habitats sont rassemblés sous l’intitulé « eaux oligo-mésotrophes calcaires avec végétation benthique à Chara spp. » (code Natura 2000 : 3140).

Quelques ouvrages de référence et ressources

Arbeitsgruppe Characeen Deutchlands [ACD] (éd.), 2016. – Armleuchteralgen : Die Characeen Deutschlands. Berlin Heidelberg, Springer-Verlag, 618 p.

Bailly G. & Schaefer O., 2010. – Guide illustré des Characées du nord-est de la France. Besançon, Conservatoire botanique national de Franche-Comté, 96 p.

Boissezon A., Auderset Joye D., Schwarzer A., Prunier P., 2017– Système d’information pour les espèces menacées et prioritaires : Characées, Macrophytes aquatiques. https://www.infoflora.ch/fr/flore/characeae/identification.html

Labroche A., 2017Les Characées, des algues pas comme les autres. De l’esquisse du taxon à l’état des connaissances pour le département de l’Isère. Revue naturaliste de l’association Lo Parvi, N°25 – année 2017 – p 50-66.

Mouronval J.-B., Baudouin S., Borel N., Souliè-Marsche I., Klesczewski M. & Grillas P., 2015 Guide des Characées de France méditerranéenne. Editions Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage, 214 p.